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Entretien avec Julia Marton Lefèvre

A green shift ?

 

Julia Marton Lefèvre, Présidente du Prix Tyler pour l'environnement, Ancien Directeur Général de l'UICN, Membre du Conseil d'Administration de la Fondation Prince Albert II de Monaco

Nous fêtons ce mois-ci le 50e anniversaire de la première Journée de la Terre.

L’affiche de cette journée est désormais bien connue, avec son simple  message qui nous rappelle que «l’ennemi, c’est nous».   

Certes, la crise que nous vivons aujourd’hui menace la santé de l’humanité, mais elle est  étroitement liée aux autres crises dont nous parlons depuis des années :

La crise du changement climatique et de la perte de biodiversité, qui représentent  toutes deux une menace pour la santé de l’humanité et pour celle de la planète.

Il est très possible que cette épidémie soit parvenue à nous directement  de la nature que nous, êtres humains, avec notre soif insatiable d’exploiter toujours plus, avons gravement perturbée.

Nous devons de toute urgence réconcilier l’être humain avec la Nature qui nous apporte les services essentiels pour notre santé, notre nourriture, notre eau, et notre capacité à lutter contre le changement climatique.  

Une étude récente du think-tank «Destin Commun»  menée en France a montré clairement que, quelles que soient les différences entre les gens, la protection de l’environnement est une valeur largement partagée.

Je suis sûre qu’il en est de même dans la plupart des pays.

Hélas, l’écart est encore immense entre cette compréhension des choses et les mesures prises par nos gouvernements pour que nos comportements permettent à la Nature de continuer son œuvre.

J’espère sincèrement que nous serons capables de tirer les enseignements de la pandémie sans précédent que nous traversons  tous aujourd’hui,  et qui est pour la première fois subie par tous les pays, qu’ils soient développés ou en voie de développement.

Nous sommes donc bel et bien tous dans le même bateau, et retourner à nos anciennes habitudes après la fin de cette pandémie ne suffira pas.

Je pense que nous avons compris désormais que tous les êtres humains dépendent les uns des autres et d’une planète en bonne santé sur laquelle nous pourrons prospérer, ainsi que les générations futures.

Les gouvernements, le secteur privé et tous les citoyens doivent prendre cette question au sérieux et se mettre d’accord pour mettre en œuvre maintenant des mesures qui sont déjà bien connues.

Nous avons aujourd’hui démontré que nous sommes capables de réagir à une crise avec efficacité, énergie et rapidité.

Si le résultat de cette crise est de nous avoir appris à nous  comporter plus généreusement envers autrui et envers la planète, alors les souffrances de cette pandémie n’auront pas été en vain et nous pouvons nous réjouir d’avoir beaucoup, beaucoup d’autres Journées de la Terre à fêter ensemble.